Interview Expert : comprendre les besoins du bâtiment pour une solution sur mesure

Ingénieur de formation, Olivier Lecoq est Surface Product Manager chez Celsius Energy. Après avoir été Ingénieur construction, puis Responsable de projet de construction chez SLB, il a rejoint Celsius Energy en qualité de Responsable de projet géothermie puis Responsable du pôle Local technique et Bâtiment (R&D + Opérations). Dans cette interview, il dévoile les différentes étapes permettant de dimensionner le local technique.

Le local technique est un pilier essentiel de notre solution. Pouvez-vous expliquer comment il est conçu ?

Sa conception se déroule en 3 étapes. La première consiste à comprendre parfaitement comment fonctionne le bâtiment auquel notre local technique va se connecter. Pour rappel, le bâtiment a trois besoins principaux : le chauffage, la climatisation et l’eau chaude sanitaire. N’importe quel bâtiment a ces 3 besoins et parfois, selon ses usages, notre système devra délivrer tout ou partie de ces besoins-là.

La deuxième étape va être de comprendre quels vont être les besoins en énergie de ces 3 services. Pour cela, nous allons identifier ce que le bâtiment va demander au système de production tout au long de l’année. A chaque heure de l’année, il existe une demande spécifique en chauffage, en climatisation et en eau chaude sanitaire. Par exemple, quelle va être la puissance de la demande le 26 février à 14h par le système ? Nous allons faire cette analyse sur une année complète. Pour cela, nous créons un modèle du bâtiment nous permettant de calculer la demande énergétique horaire de celui-ci sur cette année-là.

Quelles données sont utilisées ?

Il y a plusieurs possibilités. Pour un bâtiment existant, on peut s’appuyer sur des factures. Sur une installation au gaz, nous allons regarder les factures gaz et voir, par exemple, qu’aux mois de janvier, février et mars, la consommation est plus importante qu’aux mois de juin, juillet et août. Nous allons répartir cette consommation sur les 365 jours de l’année et sur les 8700 heures de l’année pour nous permettre de terminer par la facture dans la « vraie vie ». Ça, c’est une option.

Une deuxième option est d’avoir les relevés des compteurs thermiques instrumentant le bâtiment. Ces compteurs enregistrent en temps réel le comportement du bâtiment, à savoir les puissances appelées sur chaque besoin ainsi que l’énergie totale produite. Cela nous permet de retracer fidèlement le besoin énergétique sur les 3 besoins.

Enfin, si nous n’avons ni facture ni compteur, nous pouvons faire une simulation logicielle – plus précisément une simulation thermique dynamique – qui a pour objectif de remodéliser le bâtiment. Nous le reconstruisons sur le logiciel avec, par exemple, les épaisseurs de plancher, la surface, le type de vitrage, etc. Nous évaluons l’efficacité de chacun des matériaux qui composent le bâti. Nous allons également prendre en considération comment celui-ci est utilisé par les occupants : par exemple, est-ce que la consigne de température en chauffage dans les locaux est à 19°C ? Est-ce que le bâtiment est occupé le week-end ou pas, etc.

Une fois que le bâtiment, et son usage, sont modélisés le logiciel va calculer son comportement vis-à-vis des conditions météorologiques sur l’ensemble d’une année de référence, permettant à la fin de déterminer ses besoins en chauffage, climatisation et eau chaude sanitaire.

Revenons aux différentes étapes, que se passe-t-il ensuite ?

De son côté, l’équipe « sous-sol », composée de géologues et hydrogéologues, analyse l’entièreté des caractéristiques du sol (Cf. Interview expert Ombline Le Maréchal) sur lequel va être implanté le projet. Cela nous permet de connaître ses caractéristiques physico-chimiques, les difficultés ou non de forage, la profondeur, l’implantation et le nombre de sondes, etc.

Une fois que le sous-sol et le bâtiment sont parfaitement compris et modélisés, alors notre équipe va pouvoir identifier la couverture la plus pertinente à traiter via notre système de géoénergie.

Pour cela, nous utilisons un logiciel interne très sophistiqué. Celui-ci nous permettra de déterminer avec précision la couverture à faire en géothermie pour les besoins en chauffage, climatisation et eau chaude sanitaire, de sélectionner le type d’appoint pour faire le complément d’énergie nécessaire au bâtiment, puis de calculer la performance énergétique de l’ensemble de la solution (géoénergie + appoint).

Peut-on adapter le dimensionnement aux enjeux du client ?

Chez Celsius Energy, c’est même un volet essentiel et incontournable.

Le premier enjeu est la volonté du client de réduire son impact environnemental. Dans ce cas, le principal critère de comparaison sera les émissions de CO2 du système par rapport à d’autres systèmes, ainsi que les objectifs de réduction de son empreinte carbone.

Le second critère est lié à la consommation d’énergie. Le client est soumis en France à des directives réglementaires, en neuf comme en rénovation, principalement Décret Tertiaire ou RE2020, avec des objectifs de réduction de la consommation.

Ensuite, il y a la facture énergétique. Là aussi, le client nous fait part de son ambition de réduire sa facture de x% grâce à notre système énergétique.

Il y a donc ces 3 composantes : carbone, énergie et facture, qui cadrent aussi le projet.

Au-delà de ces critères, il y a l’enjeu du temps de retour sur investissement. Il faut que notre système, en comparaison d’une solution existante ou d’une solution technique alternative, fixe le ROI à 5, 10 ou 15 ans par exemple.

Ce quatrième paramètre fait partie intégrante du projet et participe à déterminer quelle technologie mettre en avant, quel va être le taux de couverture, etc.

 

La solution retenue intègre donc tous ces paramètres ?

En effet. Une fois que nous avons appréhendé les enjeux du client, le sous-sol et le bâtiment, nous pouvons créer notre « boîte ». La boîte, c’est un local technique avec une pompe à chaleur mais pas que…

Nous déterminons une solution ayant en base une pompe à chaleur géothermique, complétée ou non par des appoints qui peuvent être une pompe à chaleur aérothermique, une chaudière gaz ou tout autre appoint (électricité, biomasse…). Nous avons développé un logiciel propriétaire, complet et puissant, qui nous permet de bien établir la puissance de pompe à chaleur installée et le nombre de sondes à implanter en comparaison de la couverture énergétique que l’on veut adresser.

Grâce à cette bonne appréhension, nous arrivons à optimiser, à avoir de meilleures solutions que la concurrence. Nous avons la capacité de mettre des choses beaucoup plus simples en place, plus efficaces, qui nous permettent d’être pertinents financièrement, techniquement et énergétiquement.

C’est aussi cette maîtrise de l’ensemble de la chaîne qui nous permet d’avoir des solutions différentes.

 

Une solution mise en place peut-elle être répliquée à d’autres projets ?

C’est même notre objectif ! Ce qui nous différencie entre autres de nos concurrents, c’est la standardisation : nous industrialisons nos solutions techniques. En l’occurrence, pour le local technique, nous proposons une solution ou des solutions bien spécifiques pour tel ou tel besoin du bâtiment. Un bâtiment qui a besoin de haute température pour faire du chauffage uniquement n’aura pas la même solution qu’un bâtiment qui demande du chaud et du froid.

Ce savoir-faire nous permet de définir des solutions que nous avons industrialisées avec des équipements spécifiques pour telle ou telle typologie de bâtiment. Le fait d’industrialiser nos réponses techniques permet d’obtenir une fiabilité des performances inégalées. En effet nous concevons les solutions que nous réalisons puis que nous opérons tout en enregistrant leur comportement en exploitation. Cela permet d’avoir un retour d’expérience constant sur les performances de nos systèmes, gommant au fur et à mesure les incertitudes ou les défauts et améliorant toujours plus nos modélisations et nos produits en phase de conception.

Par exemple, si nous décidons d’installer une pompe à chaleur de la marque Y avec le modèle X, c’est cette gamme, avec ce modèle, qui sera modélisé dans notre outil de dimensionnement. Cela permet également de s’assurer que le design est le plus fiable possible par rapport au comportement réel du bâtiment et du local technique.

Et cela nous permet de mettre à disposition du client des solutions robustes et maîtrisées.

 

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