Ingénieur géologue diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure de Géologie (ENSG Nancy) spécialisé en géologie des énergies puis du mastère spécialisé géosciences pétrolières de l’IFP School (Rueil-Malmaison), Etienne Coudert est Geologist Engineer chez Celsius Energy. Il intervient aux opérations pour la partie sous-sol avec une équipe d’ingénieurs géologues et hydrogéologues. L’équipe participe au dimensionnement des installations, au suivi des travaux jusqu’à la mise en service. Son rôle consiste également à rechercher des technologies innovantes pour améliorer nos solutions géothermiques et faire avancer la filière. Dans cette interview, Etienne dévoile comment Celsius Energy repense les échangeurs géothermiques pour stocker et restituer la chaleur, saison après saison. Une approche innovante qui maximise les performances de nos installations et pose les bases d’un nouveau standard pour la géoénergie.
Ingénieur géologue diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure de Géologie (ENSG Nancy) spécialisé en géologie des énergies puis du mastère spécialisé géosciences pétrolières de l’IFP School (Rueil-Malmaison), Etienne Coudert est Geologist Engineer chez Celsius Energy. Il intervient aux opérations pour la partie sous-sol avec une équipe d’ingénieurs géologues et hydrogéologues. L’équipe participe au dimensionnement des installations, au suivi des travaux jusqu’à la mise en service. Son rôle consiste également à rechercher des technologies innovantes pour améliorer nos solutions géothermiques et faire avancer la filière. Dans cette interview, Etienne dévoile comment Celsius Energy repense les échangeurs géothermiques pour stocker et restituer la chaleur, saison après saison. Une approche innovante qui maximise les performances de nos installations et pose les bases d’un nouveau standard pour la géoénergie.
Pourriez-vous expliquer la notion de « batterie thermique » pour les échangeurs de chaleur ?
Le principe de la géoénergie repose sur l'extraction des calories et frigories du sous-sol et des roches qui le composent. Ces énergies sont ensuite ramenées à la surface, amplifiées grâce à une pompe à chaleur, puis transférées au bâtiment. Selon les saisons, nous puisons des calories du sous-sol pour chauffer le bâtiment en hiver et, inversement, en été, nous retirons les calories du bâtiment pour les stocker dans le sous-sol, créant ainsi une véritable batterie géothermique qui se charge et se décharge à l'infini au grès des saisons tant que les cycles chaud/froid restent équilibrés, offrant une solution durable pour la gestion thermique. Il existe différentes méthodes pour récupérer ces calories du sous-sol, comme l'utilisation d'une nappe phréatique ou de sondes géothermiques en boucle fermées. Pour ces dernières, des tubes en U sont insérés dans le sous-sol, permettant au fluide caloporteur (eau glycolée) de circuler et d'échanger/stocker des calories au contact des roches. Dans le cas de la géothermie sur champ de sondes, l'efficacité de notre échangeur de chaleur géothermique dépend des propriétés du sous-sol (conductivité et capacité thermique des roches, température initiale du sous-sol), des caractéristiques de complétion (conductivité du coulis géothermique, résistance thermique, configuration en simple U ou double U, diamètre des sondes… etc) et de la géométrie du champ de sondes (espacement entre les sondes, inclinaison, volume occupé…). En optimisant ces facteurs, pouvons garantir que nos systèmes offrent une efficacité maximale.
Comment comparer les performances de différents types d’échangeurs géothermiques ?
Pour caractériser les différents échangeurs géothermiques et pouvoir optimiser les facteurs évoqués précédemment, nous devons les comparer entre eux, et pour comparer ce qui est comparable, nous voulons nous affranchir du bâtiment et de ses besoins thermiques spécifiques ainsi que du type de pompe à chaleur, qui sont des variables qui ne sont pas utiles pour la comparaison des échangeurs géothermique à proprement parler. Tout d'abord, nous avons pensé à une analogie avec la " Worldwide Harmonized Light Vehicles Test Procedure ", également connue sous le nom de WLTP, qui est une normalisation mondiale introduite pour garantir que les données des véhicules soient comparables entre différents modèles et marques, offrant ainsi aux consommateurs une base fiable de comparaison en termes d'émissions de CO2, de consommation de carburant, etc. Une fois de plus, nous voulons comparer ce qui est comparable et nous avons également besoin d'une procédure claire, avec la seule différence que nous souhaitons une méthode pour comparer les échangeurs géothermiques en amont et non les tester une fois réalisés comme une voiture avec la WLTP. Nous avons en partie trouvé cette méthode dans la littérature scientifique grâce à une publication de Casasso et Sethi nommée "G.POT: A quantitative method for the assessment and mapping of the shallow geothermal potential", publié dans la très respectée revue Energy en 2016. Cette méthode repose sur plusieurs hypothèses clés et définit le potentiel géothermique comme la charge thermique pouvant être échangée par un échangeur de chaleur géothermique avec le sous-sol. La charge thermique est définie par une courbe de forme sinusoïdale représentant les cycles saisonniers. La méthode G.POT prend en compte : (1) les propriétés thermiques du sous-sol ; (2) les propriétés thermiques du forage, en particulier sa résistance thermique ; (3) les paramètres opérationnels et de conception de l'installation, tels que la longueur totale des sondes, la température limite du fluide caloporteur, la durée de la saison de chauffage/climatisation et la durée de vie simulée. Cependant, la méthode G.POT présente certaines limites : 1) elle est actuellement applicable uniquement pour le chauffage ou le refroidissement, mais pas pour les deux ; 2) elle implique une pulsation variable. Pour simplifier la méthode, nous avons décidé d'utiliser une impulsion unique qui s'ajustera automatiquement pour que la sinusoïde atteigne les limites hautes et basses, ce qui correspond à un profil de besoins standardisé, utilisable à des fins de comparaison des différentes géométries de forage.
Comment le logiciel propriétaire sur mesure de Celsius Energy utilise-t-il les propriétés thermiques du sous-sol et la géométrie de forage de l’échangeur pour optimiser les capacités de puissance et d'énergie de ces batteries géothermiques ?
Notre logiciel interne de dimensionnement et d’assistance au design, intègre déjà des algorithmes permettant d'optimiser l'architecture de l'échangeur géothermique en fonction des contraintes de surface et des limites du site, ainsi que des propriétés thermiques du sous-sol et de la complétion des puits. L’une des innovations clés de Celsius Energy est l’utilisation de forages inclinés généralement organisés en forme d’étoile, qui réduit significativement l’emprise en surface des installations. Afin de faciliter la comparaison de l'efficacité et du coût de différentes architectures d'échangeur géothermique pour un site donné, nous avons implémenté une fonction de « batterie thermique » dans notre logiciel afin de caractériser l'échangeur géothermique.
Nous utilisons un algorithme itératif conçu pour déterminer l'amplitude sinusoïdale maximale de la puissance (kW) garantissant la maximisation des limites de température réglementaires, optimisant ainsi les performances. Par exemple, en France, la réglementation impose des limites de température comprises entre -3 °C et 40 °C pour le fluide caloporteur circulant dans les sondes pour des raisons écologiques notamment. Les résultats de cet algorithme sont deux nombres suffisants pour caractériser la batterie, qui dépend uniquement de l'échangeur géothermique : 1) la Power Capacity (kW) lorsque les besoins thermiques sont parfaitement équilibrés ; 2) la Power Capacity (kW) en chauffage seul. Cette approche vise à définir un nouveau standard, une métrique commune pour caractériser les échangeurs géothermiques en termes de capacité de leur batterie géothermique. Ceci est uniquement à des fins de comparaison des différents échangeurs. Dans la réalité, les profils de besoins chaud et froid des bâtiments seront plus complexes qu’une simple sinusoïde.
En quoi les besoins thermiques du bâtiment conditionnent la géométrie et le design de l'échangeur géothermique ?
Toutes nos simulations effectuées avec la fonction « batterie thermique » de notre logiciel sur des cas d’études réels ou synthétiques ont montré qu’en cas de besoins équilibrés en chaud et en froid, les différentes géométries de forage importent peu. Qu’il s’agisse de sondes verticales avec des écarts inter sondes de 5, 10, 15 ou 20 m, de sondes inclinées avec des inclinaisons de 7, 10, 15 ou 20° ou un mix de sondes verticales et inclinées, elles montrent des performances similaires, leur batterie thermique est équivalente. En revanche, en cas de besoins déséquilibrés avec en réalité une écrasante majorité des besoins en chaud supérieurs aux besoins en froid, la géométrie de forage devient importante et notamment la distance entre les sondes. Une des conclusions est qu’en géoénergie, les besoins en froid sont très importants pour la pérennité du système, car la batterie doit pouvoir se recharger. Les besoins croissants en climatisation en Europe nous offrent l'opportunité d'améliorer les installations de pompes à chaleur géothermiques en équilibrant chauffage et climatisation. C'est essentiel pour une meilleure efficacité énergétique.
Quels sont les avantages de la mise en œuvre de forages inclinés en forme d’étoile par rapport aux conceptions verticales traditionnelles ?
Indéniablement, l’avantage principal est une emprise en surface drastiquement réduite par rapport à un champ de sondes verticales, où ces dernières sont habituellement espacées d'une dizaine de mètres. Cette réduction peut correspondre à 6, 50 voire 100 fois moins de surface occupée suivant la géométrie de forage. De même, les raccordements en surface dans les tranchées entre les sondes, le collecteur et le bâtiment sont minimisés car tout est regroupé au même endroit. En phase de travaux, cette emprise réduite est également très appréciable surtout lorsque le lieu est fréquenté comme un parking ou des espaces publics par exemple. Cela permet également aux propriétaires de conserver totalement, et sans prendre de risque, la valeur foncière de leurs terrains s’ils veulent les vendre ou construire dessus.
Ensuite, il faut rappeler que les méthodes et les capacités de modélisation par les logiciels développées par Celsius Energy ont été audités favorablement par le BRGM pour l’ADEME, signifiant bien que ces modèles peuvent être utilisés pour dimensionner les champs de sondes géothermiques inclinées (ou droites) avec confiance et d’en comparer les performances rigoureusement. Il a été démontré qu’avec des longueurs totales forées égales et parfois même plus courtes selon les configurations par rapport aux forages verticaux traditionnels, les systèmes Celsius Energy en sondes inclinées répondaient aux mêmes besoins en chaud et en froid a minima, fournissant une « batterie géothermique » équivalente.
Avez-vous des exemples d’une étude de cas récente en Europe qui mette en évidence les applications pratiques et les avantages de cette approche de modélisation dans des scénarios réels ?
Je peux citer le projet du démonstrateur Celsius Energy situé à Stonehouse au Royaume-Uni. Ce centre technologique de 4 500 m² du groupe SLB, initialement équipé d'un système traditionnel de gaz et de refroidissement, a adopté la solution avancée de Celsius Energy. Réalisé en seulement 10 mois sur un site occupé, proche du bâtiment sur le parking, la faible emprise au sol du chantier était indispensable pour conserver l’accès des employés. Le système comprend 18 forages géothermiques inclinés d’une longueur de 200 m avec une inclinaison maximale de 20° pour une distance entre les sondes de 20 m en profondeur. Il est associé à une pompe à chaleur géothermique gérée par une plateforme digitale qui optimise les performances énergétiques en temps réel. Les contraintes de surface et les limites d’une parcelle plutôt restreinte ont rendu la conception d'un échangeur géothermique vertical impossible, car pour une longueur forée identique (3600 mètres linéaires), nous aurions dû placer les sondes à 5 m d’écart les unes des autres. Cela aurait rendu le forage très délicat et aurait causé trop d’interférences thermiques en plus d’une emprise en surface importante et de la gêne occasionnée. En utilisant la fonction batterie géothermique de notre logiciel propriétaire nous avons pu mesurer que l’échangeur pouvait atteindre (sous profils de charge standardisé) une Power Capacity de 113 kW avec des besoins équilibrés et de 63 kW en chauffage seul pour les sondes inclinées, contre 111 kW pour des charges équilibrées et 54 kW en chauffage seul pour les sondes verticales. Nous constatons une fois de plus que la puissance est équivalente quand les besoins sont équilibrés, mais avec une différence en chauffage seul. Nous pouvons également citer un projet d’une plus grande ampleur dans le logement social au nord de Londres qui comporte 86 forages (22 verticaux et 64 inclinés) pour une emprise en surface de 1500 m2 environ contre 6500 m2 s’il n’y avait que des puits verticaux espacés de 10 m. Pour ce projet, la fonction batterie thermique donnait d’ailleurs une Power Capacity, lorsque les besoins thermiques sont équilibrés, représentant le double de celle en chauffage seul.
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